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29/01/2009

Que faire un jour de grève ?

En ce jour de grève, nombreux sont ceux qui ont fait le choix de ne pas aller travailler. Que faire dès lors ? lui rendre visite. Elle se trouve dans une grande allée de l’aile Vivant Denon au Louvre. Un peu écrasée par la hauteur de la galerie et les grandes peintures qui l’encadrent. Elle n’est pas, comme La Joconde, indiquée dès l’entrée et aucun jeu de piste fléché ne mène jusqu’à elle. Pas de barrière empêchant de s’approcher, pas de verre protecteur : on peut lui parler à l’oreille que masque une improbable chevelure épousant la pommette volontaire. La colère dans le regard n’est pas due à la solitude ou à l’abandon, au milieu de la foule. Pas même aux pas perdus des promeneurs du Louvre. Cette colère a 512 ans et elle ne s’est jamais démentie. Le troisième œil, que forme le camée de la ferronnière, détient à l’évidence le secret du tableau que le peintre perçut sans le connaître vraiment. Léonard De Vinci aurait pu dire, comme Jean-Luc Godard : « Je parle de ce que je ne connais pas ». N’attendez pas de trouver en moi des certitudes nous dit-elle, mais profitez des fenêtres qu’ouvrent ma contemplation. On ne saurait trop recommander de contempler la Belle Ferronnière.

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Léonard de Vinci - La Belle Ferronnière - 1497

Le contraste entre la foule invariablement massée devant la Joconde et le passage sans arrêt devant la Belle Ferronnière interroge : la désignation sociale plus que l’observation particulière fait le chef d’œuvre. L’émotion doit surgir là où elle a été indiquée. La singularité de la découverte le cède à la reconnaissance collective. Le Belle Ferronnière n’enlève rien à la Joconde, et l’on peut admirer les deux. Mais pour découvrir la première, il faut prendre le temps de l’errance attentive, du regard circulaire au-delà du point focal et des chemins fléchés. Il faut également s’affranchir un peu, en toute légèreté et sans acrimonie, de la recommandation sociale. Bref, éprouver un temps de liberté qui permet au regard de voir vraiment. C’est à cette condition que l’on peut apporter à la banalité du quotidien un éclat sans cesse renouvelé.