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03/07/2010

Terzieff

Les textes étaient magnifiques : Hoelderlin, Cendrars, Adamov, Rilke...Toutefois, leur densité et leur enchaînement ne permettait pas de les habiter totalement. L'émotion n'avait pas toute la place pour se répandre. Le spectacle était prenant, mais une légère insatisfaction subsistait. Et puis le dernier mot du dernier texte fut dit. Et Laurent Terzieff, qui était seul en scène et récitait des textes choisis par lui pour la représentation intitulée "Florilège" et présentée au Lucernaire, se tut. Il s'avança sur scène et se figea. La tête haute. Le regard très loin au devant de tout. Avec nous pourtant. Et cela dura. Cela dura un temps long, infini qui dure encore. La présence de Laurent Terzieff à  cet instant illumina la salle obscure comme jamais lumière n'avait défié le temps, l'espace, la vie. S'il est dans la vie des instants de grâce, il en est de plus rares où l'indicible plénitude de l'instant s'accomplit dans un silence sacré. Ainsi paraissait Laurent Terzieff qui ne paraîtra plus.

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Laurent Terzieff était le tragique de la vie incarnée avec la légèreté de l'enfant. Voici ce qu'il déclarait pour présenter Florilège :
La poésie fait parole de ce qui, avant elle, ne l'était pas, et qui par elle le devient. Parole de ce qui avant elle et sans elle, ne saurait être dit. Elle constitue une ouverture vers cette face invisible du monde qui existe en dehors de nos représentations, et qui nous relie à tout et à tous, qui réconcilie toute chose, même les contraires, jusqu'à nous faire entendre le silence des mots, jusqu'à réconcilier nos rêves de la nuit et le rêve éveillé de nos journées. En visitant le monde à l'intérieur de chacun de nous, elle abolit la coupure originelle entre l'objet perçu et la conscience qui perçoit. Dans mon travail, en grande partie solitaire, il m'est souvent venu à l'esprit cette exhortation de Saint Benoît : "Soyons présents à la psalmodie, de telle façon que notre homme intérieur s'accorde avec notre voix." Laurent Terzieff.