11/11/2016
La loi travail, au-delà des slogans
Plus on travaille sur la loi, et plus on vérifie la formule de Gérard Lyon-Caen selon lequel le droit est une technique réversible. Car si l'on veut bien sortir des slogans et considérer les dispositions adoptées le 8 août dernier, on s'aperçoit qu'il est souvent délicat de dire a priori si la règle de droit s'avèrera à l'usage plus favorable aux employeurs ou aux salariés, si tant est que cette grille de lecture ne soit pas totalement périmée. En effet, dès lors que l'objectif est de développer la négociation collective, c'est le résultat de la négociation qui décidera véritablement de la portée du texte. Le pire serait d'ailleurs que négociation il n'y ait pas, ce qui constituerait le véritable échec de la loi Travail. Si l'on recense tous ceux qui peuvent avoir un intérêt objectif à cet échec, depuis les organisations syndicales opposées au texte jusqu'aux organisations patronales qui peuvent penser que dans ce cas on fera une place plus grande à la décision unilatérale de l'employeur, le pari n'est manifestement pas gagné.
Un moment de réflexion sur la loi Travail
Ce sont ces questions, et quelques autres, que l'on a abordé mercredi dernier avec plus de 200 délégués syndicaux de la CFTC, organisation qui a contribué à faire que la loi finale ne ressemble en rien au projet présenté au mois de février dernier. Pour avoir une idée des débats, vous pouvez vous reporter à l'excellent compte rendu réalisé par le journaliste d'actuel CE, avec en prime l'interview de votre serviteur. Pour visualiser le tout, c'est ICI.
21:43 Publié dans ACTUALITE DES RESSOURCES HUMAINES, DROIT DU TRAVAIL | Lien permanent | Commentaires (1)
06/11/2016
Un équilibre encore friable
Le Jaune Budgétaire, qui contient les statistiques relatives à la formation et paraît chaque année à l'occasion du projet de loi de finances, a le petit inconvénient de fournir des chiffres qui datent souvent de 2 ans. Mais surprise cette année, il comporte également la collecte réalisée en février 2016 par les OPCA sur la base de l'année 2015. Soit la première collecte postérieure à la réforme de la formation professionnelle et la première qui permettait aux OPCA de collecter 4 types de ressources : les ressources légales (1 %) gérées, les ressources légales collectées pour autrui (1 % reversé au FPSPP ou aux FONGECIF), les ressources conventionnelles et les versements volontaires. Résultat des courses ? une collecte globale à 6,7 milliards légèrement en hausse par rapport aux collectes des années précédentes (6,5 milliards). Ce qui pourrait constituer une première surprise : le passage de 1,6 % à 1 % n'a pas pour effet une réduction des fonds versés aux OPCA.
Deuxième constat : les entreprises ont effectué pour plus d'un milliard d'euros de versements volontaires aux OPCA. Pour ceux qui prétendent que les OPCA ne servent à rien (y compris quelques candidats à la présidentielle), voici un premier démenti. On a rarement vu des entreprises verser volontairement un milliard d'euros sans raison. Troisième constat : la dynamique de la négociation collective ne vient que faiblement au soutien de la formation. Avec 500 millions d'euros versés en application d'accords de branche, les fonds conventionnels ne représentent que moins de 10 % des fonds collectés par les OPCA. Or, il s'agit des seuls fonds sur lesquels la branche a toute liberté pour décider de l'affectation. On pourrait donc en conclure que les partenaires sociaux n'ont pas su trouver, par la négociation collective, des usages suffisamment pertinents et innovants (sauf exception évidemment) pour inciter à la conclusion de tels accords. Avoir le double de versements volontaires, qui restent acquis à l'entreprise, que de versements conventionnels, démontre la limite de la valeur ajoutée de la mutualisation.
Dernier constat : on connaît la formule, les moyennes sont des insultes à la singularité. A considérer les chiffres de collecte, on s'aperçoit que deux modèles économiques, et sociaux, apparaissent désormais. Les OPCA centrés sur le seul 1 % et leur mission légale, et les OPCA engagés dans une politique très volontariste de services aux branches et aux entreprises. Il ne faudra pas attendre trop longtemps (le mois de février prochain), pour savoir si ce modèle peut perdurer ou s'il a bénéficié de l'effet d'habitude et d'inertie lié au système précédent.
16:28 | Lien permanent | Commentaires (3)