Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

06/10/2011

Ma cassette, ma cassette (ad libitum)

Le graphiste va être licencié pour motif économique. Anticipant sur la rupture annoncée, il lance sa recherche d'emploi sur son site. Et pour preuve de ses compétences, met en ligne quelques travaux réalisés pour son employeur. Celui-ci a-t-il vu l'occasion de réaliser quelques économies ? ou bien considère-t-il que tout ce qui se produit dans l'entreprise est sa propriété et ne peut être présenté, diffusé, mis en avant sans son accord ? ou bien l'employeur est-il juste en retard d'une époque et n'a pas encore intégré que le système des enclosures c'était possible au 19ème siècle avant la révolution industrielle mais pas vraiment après la révolution numérique ? Toujours est-il que le salarié est licencié pour faute grave pour avoir utilisé à son profit des oeuvres ne lui appartenant pas. C'est à moi, à moi, à moi répéta l'employeur pendant qu'il écrivait la lettre de licenciement.

La Cour de cassation sanctionne cette fureur que l'on souhaite passagère : le salarié ne faisait que présenter des travaux qui étaient consultables sur le site de l'entreprise et du client concerné et en faisant état de sa qualité de salarié, citant même l'entreprise qui aurait pu y voir une contribution à sa notoriété.

ingres-martial-raysse Made in Japan - La grande Odalisque - 1964.jpg

Martial Raysse - Made in Japan - La grande Odalisque - 1964

Imagine-t-on Ingres, surgissant un instant du bain turc dans lequel il coule des jours heureux, pour crier à Martial Raysse : Mon Odalisque, mon odalisque, elle est à moi, détruis cette peinture...Ingres avait trop de copies et de calques derrière lui pour ne pas savoir que l'oeuvre n'appartient plus à son auteur.

La Cour de cassation, par sa décision du 22 septembre 2011, créé quasiment le droit de citation des productions réalisées pour démontrer ses compétences. Et plus fondamentalement, la possibilité pour tout salarié remis sur le marché du travail d'utiliser en toute transparence et loyauté le travail passé pour en trouver un nouveau. Une nouvelle occasion de constater que pour les entreprises, les juges et les salariés, les frontières de la liberté d'expression ne traversent pas les mêmes champs, dont on rappellera qu'ils échappent désormais aux enclosures.

 Cass. soc., 22 septembre 2011.pdf

Les commentaires sont fermés.