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14/04/2008

La valeur ajoutée du porcher

Mais que fait donc le porcher toute la journée ? peut-on dire qu'il travaille ? il jette un oeil aux cochons, peut-être leur parle-t-il, mais les cochons semblent occupés par ailleurs, il s'ennuie ? il n'en a pas l'air, il pense, bien sur, mais à quoi ? comment parle-t-il en silence ? trop de question, allons c'est réglé, cet homme ne travaille pas.

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Enclos à cochons - Gauguin - 1888 
 
Le porcher de Gauguin me renvoie à un autre porcher. Celui-là travaillait dans un abbatoir. Il  était essentiellement chargé de l'accueil des camions apportant les cochons, réduits en l'occurence à une matière première, de les faire descendre et de les guider vers leur lieu d'abbatage. Comme beaucoup d'abbatoirs, celui-ci vivait en équilibre économique précaire. Dans ces situations, le consultant sollicité se mue en chasseur de coûts. Après un audit en règle de l'abbatoir, le verdict tombe : parmi les mesures d'économies figure la suppression de l'emploi du porcher. Le temps du social et de la gestion familiale est terminé. La rentabilité a ses exigences que les sentiments ne peuvent comprendre. Exit le porcher. Ainsi fut fait, et quelques autres choses également.
 
Las, non seulement le redressement ne fut point au rendez-vous, mais la rentabilité de l'abbatoir déclina. Le consultant déclara qu'il était trop tard et qu'il eut fallu le contacter bien plus tôt. Et puis un salarié fit remarquer que la dégradation de la rentabilité provenait des pertes importantes en cochons : c'est que l'animal est cardiaque et que le cochon mort hors-abbatage est impropre  à la consommation. Or le taux d'accident avant abbatage avait fortement progressé depuis quelques mois. Précisément depuis que le porcher avait quitté l'entreprise et que les chauffeurs suppléaient à sa fonction en accompagnant eux-mêmes les bêtes dans l'abbatoir. Et l'on se rendit compte que le porcher savait, avait appris à force de s'intéresser aux animaux qu'il accompagnait, reconnaître les cochons stressés, ceux qui devaient être mis de côté, ou ne devaient pas être descendus du camion tout de suite, où devaient prendre du temps avant de se mettre en mouvement, etc. Ces attentions diverses permettaient d'épargner de la crise cardiaque environ 5 % du cheptel. Mais ces compétences là, et cette valeur ajoutée du porcher, que chacun avait toujours vu accompagner les cochons sans se poser de question, personne ne s'en souciait.
 
Dans toute organisation un (des) porcher(s) ? 

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